Les autres
Les autres
Mercredi 5 Mai 2021
Christophe Prudhomme est médecin au Samu 93. Il publie, chaque semaine, une chronique dans les colonnes de l’ « Humanité »
Je voudrais vous parler aujourd’hui des autres malades que ceux atteints par le Covid-19, qui sont très nombreux et que notre système de santé a négligés, voire dans certains cas abandonnés, obligé qu’il était de concentrer toutes ses forces pour essayer de gérer l’épidémie tant bien que mal. Pour exemple, je peux vous parler de mon dernier week-end de garde à l’ hôpital, où il a été très difficile de trouver des places en soins intensifs pour une patiente souffrant d’un œdème du poumon et, pire encore, pour un patient victime d’un arrêt cardiaque, heureusement récupéré grâce au massage cardiaque effectué par son entourage et à une arrivée rapide des pompiers et de l’équipe du Samu.
Au-delà de ces cas graves, nous ne comptons plus les personnes dont les interventions chirurgicales ont été repoussées et qui attendent impatiemment d’être recontactées. Or, le personnel est épuisé et il faudra bien qu’il se repose un peu lorsque le nombre de malades atteints du coronavirus aura diminué. Nous ne pouvons donc espérer une reprise normale de l’activité qu’après l’été. Cette situation montre bien la validité des revendications posées lors du mouvement de défense de l’ hôpital public qui a précédé l’épidémie. Revendications qui n’ont toujours pas trouvé de réponses du gouvernement à la hauteur des enjeux.
Si quelques augmentations des rémunérations – et encore, pas pour tout le monde – ont été arrachées, nous n’avons aucune perspective, ni sur la formation et l’embauche de personnels, ni sur l’arrêt des restructurations et des fermetures de lits. Sur la formation des personnels, l’argument avancé par le gouvernement sur la durée de la formation ne tient pas. S’il nous avait écoutés en 2019, lors de la grève des urgences, nous aurions aujourd’hui des aides-soignantes (durée de formation 1 an) et bientôt des infirmières (durée de formation 3 ans) disponibles pour ouvrir des lits. Il serait bien de rappeler avec force aux politiques que gouverner, c’est prévoir et non pas produire des clips sur Twitter pour vanter son action, comme vient de le faire le président de la République.